J’ai décidé d’aller au supermarché un samedi pour voir Billa un
peu animé (Billa est une chaîne de grandes surfaces très connue ici). Beaucoup
de vieilles personnes font leurs courses en fonction des promotions du moment :
j’ai vu des gens acheter 7 ou 8 kg de pommes, dix paquets de café. Il y a un
peu de tout, des produits du coin et des produits importés. Ce que m’avait dit
Angela n’est pas tout à fait exact : non, les légumes ne viennent pas tous
de la campagne roumaine, loin de là. Angela a une vision un peu utopique
peut-être de l’agriculture locale. A l’écouter, il n’y aurait ici ni produits
chimiques, ni élevage intensif et les cultivateurs seraient en mesure de
nourrir toute la population du pays. J’apprendrai un peu plus tard que la
Roumanie importe tout de même beaucoup, même du lait de vache. La fin du
communisme a conduit à l’éclatement des terres et des troupeaux. Aujourd’hui,
les producteurs n’arrivent pas à valoriser leurs marchandises, à coordonner
leurs efforts, dans cette région qui est sans doute la plus pauvre de la
Roumanie.
*
Je rentre chez moi avec du poisson fumé, des brocolis, des
patates, des radis noirs (qui me rappellent si fort Amiens) et des pommes du
pays. J’achète aussi de quoi faire le ménage de fond en comble dans mon
appartement (c’est mon tour cette semaine).
À 17h, je vais dans un petit café aux accents japonais, Kiddo.
Voica et Eiko y présentent une cérémonie traditionnelle : le service du thé.
Voica est roumaine mais se passionne depuis longtemps pour le Japon : à
Iasi, elle est professeur de japonais. Je regrette de ne pas avoir pris mon
appareil photo, elles sont si belles toutes les deux. Voica porte un kimono
cyan avec une large ceinture (obi) rouge. Eiko, petite et menue, a un kimono
beaucoup plus sombre. Le thé est un régal.
*
Je rencontre Mihai (ce prénom est très courant en Roumanie) avec
qui j’ai déjà échangé quelques mails sur le site de couchsurfing. Nous voilà
embarqués pendant une heure dans une discussion qui mêle anglais, français et
roumain. Mihai est sacrément bavard, pose un tas de questions et m’explique bien
des choses sur son pays, carte en main. Il se moque gentiment parce que j’ai
attrapé l’accent moldave. Et me donne rendez-vous dimanche, pour une visite
guidée de la ville.
*
À 20h, je retrouve E. et deux garçons que je ne connais pas,
Jeremy et Yann, tous les deux professeurs stagiaires de FLE (Français Langue Étrangère)
dans des lycées roumains. Nous buvons du vin de Bucovine et je les écoute
parler de leur expérience à Iasi : E. est ici depuis un an et demi, les
garçons depuis quatre mois. Yann écrit un roman fantastique et semble connaître
sur le bout des doigts les films d’horreur américains et japonais. Jeremy partage
mon amour pour la marche, Wes Anderson et la Traviata. Mais tous font un bilan
plutôt négatif de leur installation à Iasi : ville pauvre, sale, sans
charme, sans chaleur, où l’histoire ne résonne pas dans les vieilles pierres.
C’est un défi pour moi de revenir en France dans six mois avec
une impression différente (défi que je relève avec plaisir).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire