Dimanche. Nous nous levons tôt pour nous lancer sur les sentiers des
Carpates. Nous démontons les tentes et reprenons la route jusqu’au lac Bâlea,
point de départ pour les chemins de randonnée. Au passage, nous achetons du
porc séché et du caşcaval fumé que nous glissons dans nos sacs à dos. Plus des
cafés chauds et un gâteau hongrois à déguster illico : il fait froid et
nous avons besoin de forces avant d’attaquer la grande marche.
Une famille nous demande conseil pour s’orienter et Pierre-Yves,
carte en main, leur explique en anglais quel chemin prendre. Mais un peu plus tard il se
rend compte qu’il les a mal aiguillés et s’offre un petit sprint pour les
rattraper (ils ont déjà bien entamé leur ascension). Je ne sais pas ce qui m’impressionne
le plus : l’exploit physique (parce que c’en était un) ou la galanterie du
geste (très gentleman, le
Pierre-Yves).
Nous nous engageons sur un sentier très pentu : l’occasion
pour mes cuisses et mon cœur de me rappeler que je manque d’entraînement
(pourtant, j’ai pratiqué assidûment la course à pied ces derniers mois !).
Les garçons semblent flotter plus que marcher : j’ai envie de crier à l’injustice,
mais je n’avais qu’à pas choisir pour compagnons de voyage trois beaux éphèbes
aux mollets d’acier. La randonnée est superbe malgré la purée de pois qui
gribouille parfois le paysage.
Retour à 16h : le temps de retrouver notre coin de rivière
et de planter les tentes pour la nuit (mais cette fois, nous choisissons un
endroit plus accessible et je peux m’en donner à cœur joie en sautant de rocher
en rocher, suivant l'exemple du Caribou).


À l’heure du dîner, nous rejoignons la petite pension où nous
avons mangé samedi. L’ambiance est beaucoup plus calme (je suppose que les
Roumains qui étaient là pour le week-end sont rentrés chez eux). Plus de
musique, plus de danse. Sur les vingt plats indiqués dans le menu, le cuisinier
ne peut en préparer que cinq. Je commande une truite grillée et du vin rouge :
le bonheur. Nous sommes les seuls clients jusqu’à l’arrivée de deux motards
suisses (belle bedaine, veste en cuir et bière à la main : une sacrée
allure). Ils ne parlent pas roumain et le patron me demande de faire l’interprète.
Ils n’ont pas vraiment besoin de moi pour demander de la bière et des frites
mais c’est l’occasion de sympathiser. Quand les compères suisses se mettent à
câliner le petit chat du patron, je craque. On dirait deux ours amoureux d’une
coccinelle. Je ne sais pas ce que je donnerais pour prendre une photo de cet
instant.
En parlant d’ours, nous n’en avons pas encore rencontré et c’est
tant mieux. Je dois avouer que je ne suis pas rassurée à l’idée de faire du
camping sauvage. Nous avons beau prendre toutes les précautions nécessaires
(pas de nourriture ou de produit odorant dans les tentes, exit le dentifrice), j’ai lu trop d’histoires terribles pour être
tout à fait sereine.