vendredi 26 avril 2013

Faire les courses avec Paolo


Tout un poème.

Jeudi, je bataille ferme pour faire rentrer mes affaires dans une valise récalcitrante, puis je quitte mon premier appartement.

Paolo m’aide à déménager – je suis dans un état second, comme abasourdie par tant de gentillesse. Après avoir monté quatre étages avec « toute la culture française » (je cite) sur son dos, il est encore souriant. En fait de culture française, il s’agit surtout d’une accumulation de bricoles : gel douche, lessive, pot de miel, thèse de doctorat.

À la tombée du jour, nous nous mettons en route pour le Palas Mall, le lieu de tous les désirs et de tous les fantasmes consuméristes. Si un jour vous venez à Iasi et que vous vous demandez, intrigué, où sont les habitants, ne cherchez pas plus loin : ils traînent à Mall. Et que font-ils à Mall ? Ils consomment, pardi. Ils achètent des fringues, ils achètent des jeux, ils achètent des chaussures à talons, ils achètent des chaussures sans talons, ils commandent des glaces, des cocktails, des shoots d’existence à 10 lei pièce. Et dans cet incroyable Palais, le clou du spectacle s’appelle Auchan. Vous y entrez gratuitement, et vous y faites de sacrées affaires parce qu’aujourd’hui tout spécialement pour vous 1 acheté = 1 acheté.

Bref, voilà Paolo et Sibylle errant dans un dédale de rayons, en quête d’un improbable morceau de parmesan. Il faudra s’y faire : le parmesan en Roumanie, ça n’existe pas, ça n’existe pas. Heureusement, il nous reste des milliers d’autres produits pour nous consoler. Ici, chaque chose se décline sous trente formes différents : beurre sans beurre, beurre avec 10% de beurre, beurre avec 20% de beurre, beurre 100% pur beurre.

Paolo fait ses achats très consciencieusement : il lit, compare, soupèse, et dubitatif, se demande si ça marchera dans telle ou telle recette (je ne sais pas dans quel monde culinaire il évolue, mais manifestement un univers beaucoup plus élaboré que le mien). Je traduis quand je peux, et je le regarde faire, amusée, épuisée. J’ai dormi quatre heures la nuit précédente et je donnerais tout pour une bonne nuit de sommeil. Pour cela, il faudra attendre un peu : le temps de prendre possession des lieux, de retrouver un état d’esprit relativement serein.

Après deux heures de douloureuses interrogations (quelle marque pour l’huile d’olive ?), notre duo franco-italien passe à la caisse. Quand je me rends compte que par mégarde Paolo a acheté des pâtes au maïs, je suis prise d’un vrai fou rire. Pour lui, c’est un épisode plutôt traumatisant : il me fait promettre de ne jamais plus le laisser faire ce genre d’hérésie. 

À la maison, il se met directement aux fourneaux. Je vais toquer à la porte des voisins pour leur emprunter un tire-bouchon : nous fêtons notre premier repas en colocation avec du vin de la vallée de Prahova (une région proche de Bucarest). Paolo prépare du poisson en papillote. Non vraiment, je crois que ça va le faire.

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