C'est en France que j'ai réussi à poser un mot sur ce qui me stimule tellement lorsque je suis à Iasi : l'inconfort.
L'inconfort
gomme l'aspect mécanique des événements : plus rien ne semble aller de
soi. C'est pour moi un moteur extraordinaire : une manière de se
rappeler que oui-oui, on est là, tout entier, bien vivant, dans la chair
du monde.
Bien sûr, c'est un inconfort tout relatif auquel je me frotte ici : les attentes occidentales (toit, eau, chauffage, électricité) sont comblées, je reste dans un pays européen (même si l'Est et l'Ouest n'ont pas grand chose à voir) et je parle une langue latine.
Bien sûr (second volet), on peut trouver de
multiples formes d'inconfort chez soi, à la porte de sa maison : pour ne
citer que les plus douces, une nouvelle rencontre, la découverte d'un
lieu inconnu, le plaisir de brouiller ses repères dans une assiette.
J'imagine que le voyage n'est pas une expérience fondamentalement
différente : simplement, il est un concentré d'inconfort.
Autre
chose : chez moi, l'inconfort diminue quand augmente le nombre de gens
avec qui je le partage (et le rapport est exponentiel). Se confronter à
deux à l'inconnu, c'est diviser par quatre la difficulté. Voilà pourquoi
je n'aime pas vadrouiller seule en Roumanie : j'aime dénicher des
compagnons d'inconfort, parce qu'ainsi les choses me semblent plus
douces.
Et non, je ne pourrais pas, comme me l'avait
suggéré Gaël, faire une thèse itinérante (marche le matin, rédaction
l'après-midi). Parce que la recherche est pour moi un inconfort radical
de la pensée, elle doit être associée à un univers rassurant, connu -
sans quoi, toute la machine se détraque.
Bref, l'inconfort, c'est comme le sel : un peu, vous donnez du goût aux choses, trop, vous faites du cholestérol vous avez la nausée.
C'est drôle, pour moi la recherche est presque complètement un travail d'exploration (peut-être le côté historien / voyage dans le temps), et une thèse itinérante serait la parfaite transposition dans le monde physique de la démarche intellectuelle (moyennant des problèmes de régularité de la répartition marche-rédaction). The long and winding road.
RépondreSupprimerPour moi c'est un vrai fantasme qui comme tout fantasme probablement aurait du mal à prendre chair...parce que lorsque je suis sur la route, je suis toute entière dans le rythme de la marche, et ce serait un arrachement de me mettre à la recherche. Surtout, les aspects pratiques (demander aux gens où je peux dormir, construire au fil des jours un itinéraire) prendraient vite le dessus. Par contre, écrire et marcher (là je parle d'un roman, d'un journal de bord,...) : aucun problème. L'un d'ailleurs ne va pas sans l'autre, c'est l'accord parfait. (conclusion : j'arrête la thèse, je marche et j'écris la marche ? tu m'accompagnes ?)
SupprimerTout s'explique ! Cette méditation rimbaldienne nous livre la clef du mystère – car pourquoi détester février ? perplexifiait inquiet l'anonyme auteur, amateur de crocus et bouillant babineur de bugnes. Certes, Février présente à l’atrabilaire économe l’avantage d’être un mois fort court, donc méprisable à moindre frais ; mais, en fervent admirateur des allocutions sibyllines, nous refusions de croire que ces pingres considérations pussent entrer en l'esprit de notre aventurière févriphobique (frileuse, certes, mais pas fesse-mathieu pour un sou). L’énigme irrésolue nous taraudait le spectre, quand l’Illumination nous vint, à la lecture du billet d’aujourd’hui : le mois du comfort, bien sûr ! A bas l’empâtement, stop au train-train plan-plan, fi des flonflons ronflants : vive la flâne, l’aise musarde et le vagabondage !
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