Quand j’étais petite, ma mère
et moi jouions à faire des portraits chinois. L’une de nous choisissait en
secret un personnage, réel ou fictif, et l’autre lui posait des
questions : si j’étais un métier ? un objet ?
Alors il fallait répondre : je serais un boucher... je
serais une clef... (Barbe-Bleue).
Ce soir (vous y verrez une rêverie nostalgique si vous voulez),
je me prête au jeu et place la ville de Iaşi sous les feux de la rampe.
Portrait chinois.
Si j’étais...
une date : celle de Mărţişor (qui m’a définitivement attachée à ce pays).
un plat : la mămăliga cu brânza (qu’on pourrait traduire « polenta avec du fromage »).
une chanson : Dans le port d’Amsterdam, de Brel. Sans rire. Iasi n’est
pas un port et Brel n’est pas roumain, mais je ne peux pas m’empêcher
d’associer la ville à cette chanson. Je n’ai jamais autant écouté Bref que
depuis que je me suis installée ici. Tout m’y fait penser. Les Madalina que je
rencontre, les visages des gens. À mon arrivée, j’ai fait écouter Le port
d’Amsterdam à Vlad, et j’ai traduit pour mes les paroles en roumain (tant bien
que mal). Souvenir impérissable.
une couleur : le blanc de la neige, quand il n’a pas encore été
transformé en bouillie infâme.
un geste : le signe de croix effectué trois fois à chaque fois que
les Roumains (jeunes, vieux, riches, pauvres) passent devant une église (c’est-à-dire
très, très souvent).
un livre : Athanor, de
Gellu Naum.
un lieu : un bar coincé dans un sous-sol. Je dirais bien un monastère,
mais j’associe plutôt ce lieu à la campagne moldave.
un animal : un corbeau (l’équivalent roumain du pigeon ! il y en a
des centaines. J’ai vu une fois un vol de corbeaux qui recouvrait entièrement
le ciel. Grandiose. Ca change considérablement mon regard sur le corbeau. Il
faut dire que l’animal n’a pas bonne presse chez nous : La Fontaine en
fait un benêt, et de façon générale, il passe pour un oiseau de mauvais
augure).
un élément : le béton (quoi ? ce n’est pas un élément ?).
un végétal : le lilas (les tsiganes en vendent dans la rue, dans le bus, devant l'université...).
un bruit : le hurlement des chiens errants, la nuit.
une philosophie : les talons hauts (ben oui, à Iasi, et en Roumanie de
façon plus générale, le talon haut est un mode d’être et de penser, une
philosophie de vie à part entière.). Je vous fais grâce de la réflexion sur les
péripatéticiens, ces philosophes grecs qui à la suite d’Aristote cogitaient en
marchant...
un véhicule : le maxitaxi.
À suivre... (je suis ouverte aux suggestions !)
Une odeur (specialement si on y a coupe les tilleuls)? un vetement? une heure du jour :)? (Je vous le demande en pure curiosite, j'ai moi-meme toutes les reponses pour Bucarest, la ville de ma propre enfance, mais Iasi est pour moi un territoire un peu mythique :) ).
RépondreSupprimerUn odeur : celle du gaz. Je la sens dans presque tous les appartements, parce que les cuisinières sont à gaz et qu'elles mettent parfois un peu de temps avant d'obtempérer. J'aurais aimé dire les tilleuls, mais à vrai dire je n'ai jamais été frappée par cette odeur. Dehors, depuis mon arrivée, le froid a figé tout parfum. Et maintenant, le printemps tarde à arriver. J'attends avec impatience.
RépondreSupprimerUn vêtement : les coiffes sont-elles des vêtements ? Parce que je répondrais volontiers : une toque de fourrure.
Une heure du jour : 6h du matin. Je trouve que c'est le moment où la ville se livre, où les gens baissent la garde. S'y croisent aussi les couche-tard et les lève-tôt, dans une atmosphère quasi irréelle, un peu fantomatique peut-être.
Je serais curieuse de lire un portrait chinois de la ville de Bucarest, vue par Jiminy :)
La toque de fourrure m'a elargi un enorme sourire sur la figure :))). Je vais essayer de jouer aussi (peut-etre Bucarest et Bruxelles dos-a-dos), mais je dois laisser la memoire travailler un peu :) .
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