lundi 3 juin 2013

Mama Sam n'a pas peur des vampires

Vendredi dernier, le dernier jour de mai, l'université Ioan Cuza ouvrait un œil sur l'Afrique.





[o zi în Africa = une journée en Afrique]


 Au programme des festivités : prise de parole de plusieurs Africains résidant à Iasi, récit de voyage de Roumains qui sont allés en Tanzanie dans un gros 4x4 et qui en tirent une immense fierté (le powerpoint affichait en gras le nombre de litres d'essence consommés pendant le trajet...), intervention d'un journaliste qui a travaillé au Rwanda, présentation par un employé de tous les appareils et accessoires Nikon qu'il vous faut pour photographier un lion, documentaire sur la banane plantain...

Bref, un beau pêle-mêle d'expériences humaines et de publicité. 

À 18h, je me rends à l'Institut français pour le vernissage d'une exposition. Frédéric de la Chapelle, photographe de mode qui travaille en Afrique, présente le travail qu'il a mené ces dernières années (vidéo ici).


Je rencontre autour d'un verre de vin Gaby, Mathurin et Armel, tous trois installés à Iasi pour un doctorat ou un post-doctorat. Gaby et Mathurin viennent du Cameroun. Je parle longtemps de ce pays avec eux : l'Afrique de l'Ouest m'a toujours attirée et fascinée, et le Cameroun tout particulièrement, sans doute parce que ma grand-mère maternelle y a vécu, me l'a raconté. Ni une ni deux, je suis officiellement invitée chez mes nouveaux amis (ils habitent à Douala, la capitale) ! Gaby est en costume traditionnel, Mathurin en costard-cravate : le contraste est délicieux. Quant à Armel, il vient du Gabon, passe trois mois en Roumanie pour un post-doctorat (il est mathématicien) et me fait tellement rire que je ne peux retenir mes larmes. Il me raconte son expérience en Roumanie avec beaucoup d'humour et de détachement : il faut bien ça, parce que croyez-moi ce n'est pas simple tous les jours d'être africain ici.

Il me dit : "le salaire moyen est plus élevé au Gabon qu'en Roumanie, le niveau de vie est meilleur, un professeur d'université est payé cinq fois plus dans mon pays...et pourtant, la Roumanie continue de porter sur l'Afrique un regard méprisant, comme si tout le continent vivait dans la misère."

Il dort dans une chambre du campus universitaire : 10 mètres carrés à partager avec quelqu'un. C'est son troisième post-doctorat, après la France et l'Afrique du Sud (deux pays où il a été reçu comme un prince - il faut dire que c'est une pointure !). Il a déjà un poste de Maître de Conférence dans son université au Gabon. Il est marié, a des enfants. Mais à Iasi, il est traité comme un étudiant : on lui reproche même d'en demander trop quand il exprime le désir d'avoir une chambre pour lui tout seul ! C'est un hibou, il travaille la nuit, précisément quand son colocataire voudrait éteindre la lumière. En l'écoutant, je m'estime finalement bien chanceuse de ne pas avoir eu droit à un logement en résidence universitaire.

À 20h, nous filons au Palas Mall (le grand centre commercial) où a lieu un concert de musique africaine.  La chanteuse (belle femme plantureuse au déhanché stupéfiant) nous dit : "hé ho les amis, hors de question de rester les fesses sur une chaise, c'est de la musique de chez moi, il faut bouger quand on l'écoute !". Gaby nous entraîne, Aurélia et moi, pour une danse endiablée. Nous sommes trois en piste, au milieu de l'immense Palas (pour vous figurer la chose, il faut imaginer le Palas comme une sorte de temple dédié à la consommation, blanc et brillant comme une cuvette après le passage de Monsieur Propre). Gaby me dit : "hé ! tu as du sang africain dans les veines !" ... Non, par contre mon sens du ridicule s'est quelque peu émoussé ces derniers temps. Et puis j'aime trop ce rythme pour ne pas me lancer. Nous sommes peu à peu rejoints par d'autres danseurs. Le percussionniste est en transe, Sibylle aussi, le Palas Mall tout entier semble sous le charme de la chanteuse - qui a dit que sorciers et vampires ne faisaient pas bon ménage ?

1 commentaire:

  1. Comme souvent tu me fais voyager tant et plus, merci.
    Blanco

    RépondreSupprimer