samedi 18 mai 2013

Jour 6 : dans la forêt de Letea



Letea est un village lipovène. (Là normalement le Guide du Routard ou le Petit Futé devraient vous donner toutes les infos utiles dans un petit encadré jaune poussin. Je vais faire de mon mieux.)

Qui sont les Lipovènes ?
La communauté lipovène est originaire de Russie. Nous sommes à l’époque de Pierre le Grand, donc fin XVIIe-début XVIIIe s : le tsar a engagé une série de réformes que les fidèles traditionnalistes refusent de suivre. Une partie du peuple russe décide alors de quitter le pays, pour fuir les persécutions et préserver son culte. 
Installée en Ukraine et en Roumanie (notamment dans le delta du Danube), la communauté des vieux-croyants a conservé son dialecte et sa propre liturgie. Dans le delta, les villages lipovènes se reconnaissent à la couleur bleue qui partout domine : maisons, églises, portails sont peints en bleu ciel.

 
Les routes sont faites moitié de terre, moitié de sable. Nous sommes fascinés par les couleurs des maisons, tout à fait inhabituelles en Roumanie. Les toits sont en jonc et l’eau est puisée dans le puits du jardin. 



Accompagnés par un gars du coin, nous allons en charrette jusqu’à la forêt de Letea, connue pour ses chênes centenaires. Au printemps, la forêt est encore inondée par endroits : c’est assez surprenant de voir des troncs sortir de l’eau.



Nous apprendrons plus tard en discutant avec une élue que cette forêt est protégée et que théoriquement certaines parties sont interdites au public. Mais les villageois font fi de ces lois et préfèrent gagner quelques lei en jouant les guides d’un jour. On lit d’ailleurs dans tous les livres, tous les dépliants que « le delta du Danube est l’un des rares paradis terrestres où l’homme vit encore en parfaite harmonie avec la nature ». Si vous fermez les yeux sur la pollution du fleuve, si vous oubliez les immenses champs transformés en décharge par la main de l’homme, peut-être. J’ai l’impression que le mode de consommation a changé trop brusquement pour que les habitants s’y adaptent : résultat, ils jettent le plastique un peu partout dans les alentours des villages, comme ils auraient pu le faire avec d’autres matériaux périssables. Cela donne parfois l’étrange sensation que le Tout-Puissant a oublié d’installer une poubelle dans son eden et qu’Adam et Eve ont laissé traîné là l’emballage du big mac et les canettes de bière du dernier pique-nique.

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