dimanche 10 mars 2013

Mardi 5 mars : du trio au duo

9h. Gaël prend quelques photos de Văratec  avant de repartir vers Târgu Neamţ.  



Christelle-Laure monte dans un bus en direction de Iasi, Gaël et moi reprenons la route.



J’apprécie énormément la compagnie de Gaël, qui est parti à pied de Sainte-Foy-la-Grande en juillet 2012 et ne cesse de bourlinguer depuis. Il réinvente le français à la sauce pronominale : il dit, par exemple, « je me trace » et « je me galère », comme vous et moi disons « je me lève » et « je me prépare ».  Avec lui, je réalise un rêve que je ruminais depuis longtemps : celui de partir sur la route, sac sur le dos, duvet dans le sac, sans savoir où on va dormir, sans trajet préétabli.

(Mais déjà je triche, car le sac de couchage que Christelle m’a prêté n’est pas dans mon sac, mais dans celui de Gaël, mon sac étant trop petit pour contenir autre chose que deux tablettes de chocolat et une brosse à dents.)

Gaël n’a pas froid aux yeux, et se fiche de savoir s’il aura un toit pour la nuit. Il demande à droite, à gauche, et en dernier recours peut planter sa tente dans la neige et camper là où bon lui semble. Je suis un petit peu plus frileuse, dans tous les sens du terme. Je n’ai pas d’équipement suffisant pour envisager sereinement une nuit dehors et je n’ai pas envie d’être dévorée par un ours ou pire : par un grand méchant loup (il faut dire que ma rencontre avec un ours au Canada m’a laissé un souvenir impérissable). Les monastères offrent une solution idéale : ils sont souvent situés dans un paysage magnifique et accueillent les visiteurs qui veulent bien s’aventurer en terre roumaine. Encore faut-il les trouver, ces monastères. Certains ne sont pas indiqués sur la carte, et nous passons beaucoup de temps à discuter avec des gens dans les villages, à leur demander conseil, à inventer avec eux un itinéraire.



Partout la même question : mais enfin pourquoi marcher ? Il y a des bus !

Au-delà de cette incompréhension, je trouve les gens terriblement bienveillants, et très intéressés par notre petite aventure. Pourtant on ne cesse de nous mettre en garde : attention, les tsiganes/Roumains/hommes (c’est selon l’interlocuteur) sont prêts à profiter de la moindre situation.

Après une belle journée de marche, nous arrivons au monastère de Groși. Le coucher de soleil sur ce désert blanc donne une apparence presque irréelle au paysage.


Quand nous posons les sacs, c’est déjà l’heure du repas. Pour une fois, le réfectoire est rempli (d’habitude nous mangeons seuls, avant les moines). Qui va là ? Je ne sais pas : je crois que ce lieu accueille des personnes en difficultés, des hommes et des femmes jeunes et vieux qui n’ont plus toute leur tête (qui ne l’ont, peut-être, jamais eue). On nous sert un plat roboratif (mămăligă, fromage, porc) avant de nous donner une chambre à l’étage.
Dans son lit parsemé de Titi (oui, le Titi de Grosminet), Gaël lit à haute voix Walden ou la vie dans les bois. Je me laisse bercer par Thoreau et m’endors, comme souvent cette semaine, bien avant dix heures.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire