Après une matinée studieuse à la bibliothèque et un délicieux
repas au restaurant universitaire (ils ne cuisinent que des pommes de terre
mais qu’est-ce qu’ils les cuisinent bien !), je n’ai qu’une envie :
m’enfoncer dans un fauteuil moelleux et voir un film roumain. Sauf qu’ici les
fauteuils des salles de cinéma ne sont pas moelleux et que les films diffusés
sont américains. Dana me propose d’aller avec elle ‘à la piscine’. Je saute sur
l’occasion : ça ne peut pas me faire de mal de barboter un peu.
Nous retrouvons Roxana (la petite soeur de Dana, qui est tout de
même plus vieille que moi) Piaţa Unirii sous une pluie fine et glacée. Nous
entrons dans le sous-sol de l’hôtel Unirea (décidément, tout ici est sous la
terre). Là, surprise : ce n’est pas simplement une piscine qui nous
attend, c’est un vrai SPA, avec jacuzzi, sauna, hammam, salles de sport et
salles de massage... Dana et Roxana ont souscrit à un abandonnement pour six
mois qui leur offre la possibilité d’inviter quelqu’un. Je bénéficie donc d’une
‘séance découverte’. Soit... A vrai dire, je n’imaginais pas que ma première
expérience de sauna se ferait en Roumanie. La piscine est toute petite mais je
fais tout de même plusieurs longueurs, histoire de dérouiller épaules et
jambes. Assez en tout cas pour m’assurer une bonne nuit de sommeil. La chaleur
humide du hammam me plaît beaucoup, la chaleur sèche du sauna un peu moins. Une
fontaine à glace est prévue pour ceux qui sortent de la fournaise. Pour ma
part, je me contenterai d’une douche très très fraîche, de quoi revigorer un
peu les membres assoupis.
Deux heures plus tard, je sors, béate et un peu ralentie. J’ai
le temps de rentrer chez moi et de manger un morceau avant d’aller au Teatru
Fix, où j’ai rendez-vous avec Ghazi pour une bière et un brin de conversation. Il
y a là Denisa, Mădălina, Veronica, trois filles aperçues jeudi au club de
théâtre d’impro francophone. [Je ne vous ai pas parlé de ma petite expérience
théâtrale ? C’était très chouette.
Un peu bordélique et vraiment bon enfant – tout ce qu’il me faut pour me lancer
dans l’improvisation.] Je rencontre
aussi Alex, qui s’occupe d’un club de théâtre 100% roumain. Ghazi et lui veulent
organiser des matchs d’impro bilingues et me proposent [non : me somment]
d’y participer. Cu placere (avec
plaisir).
Je suis ravie de pouvoir, pour une fois, m’exprimer en langue
roumaine. Souvent les gens sont d’accord pour parler avec moi en anglais, en
français, voire en russe ou en japonais, mais en roumain, eh bien...ça leur
demande trop de patience, de m’écouter baragouiner des phrases sans queue ni
tête. Après une bière, bien que tout le monde autour de la table soit
francophone (Alex est parti), je décide de raconter ma première histoire en
roumain. C’est un conte que j’ai écrit en collaboration avec PY à Lyon et qui explique
comment les trolls et les mouches sont devenus amis. PY et moi l’avons d’ailleurs mis
en scène lors d’une veillée mémorable, déguisés en vieux trolls des bois,
devant une assemblée d’enfants trolls ébahis.
Ghazi vient à mon secours quand je tombe en panne de vocabulaire
et les gens se prennent au jeu. Denisa est tellement enthousiaste qu’elle serre
ma main brûlée – aïe.
Ils décident de prolonger la soirée au bowling et pour la
première fois depuis mon arrivée à Iasi je décline une invitation. Ma ligne de
conduite jusqu’à présent était l’assentiment : dire oui à tout ce qui se présente (dans les limites du raisonnable),
même si je suis fatiguée, même si je rêve d’un bouquin ou d’un lit. Mais
vraiment le bowling ne me dit rien : 1/
ce n’est pas ma tassé de thé ; 2/
avec ma main droite douloureuse je ne pourrais pas faire grand chose. Surtout,
je me sens assez ‘chez-moi’ ici pour me permettre de dire ‘merci, une prochaine
fois’. J’ai compris que les gens n’allaient pas s’envoler, que les occasions de
sortir ne manquaient pas, que le hasard (pour l’instant) faisait plutôt bien
les choses.
Je décide de rentrer à pied pour la première fois. D’habitude
la nuit je prends un taxi : c’est abordable (le prix d’un café à Paris) et
rassurant. Mais ce soir il n’est pas très tard, 23h tout au plus, et j’ai envie
de tenter l’aventure. Allez savoir pourquoi, je suis toujours un peu réticente
quand il s’agit de prendre un taxi. J’éprouve une sorte de culpabilité (celle d’être
‘riche’ dans ce pays qui galère) mêlée au désir de vivre ce que vivent les gens
les plus modestes. (C’est comme ça qu’une fois je me suis retrouvée à 4h du
matin dans Bucarest, tentant de prendre un bus pour l’aéroport, faisant de
bonnes et de moins bonnes rencontres.)
Tout se passe bien mais je ne recommencerai pas l’expérience.
Les ruines prennent des proportions terrifiantes dans le noir et certains
quartiers forment des blocs de nuit compacts, sans éclairages, sans repères. Je
prends l’air très méchant parce que Voica m’a expliqué qu’il faut montrer aux
chiens errants que je n’ai pas peur d’eux. Mais la situation est tellement
comique que je finis par rire toute seule : je ne suis pas sûre que les
chiens puissent se rendre compte que je fronce les sourcils.
Addendum : Non, PY n'est pas un Grec. C'était - et c'est toujours j'espère - le meilleur des colocataires.
Addendum bis : Pour ceux qui ont noté le terrible lapsus (corrigé depuis) "D'habite la nuit je prends un taxi"...eh bien je préfère ne pas commenter !
Addendum : Non, PY n'est pas un Grec. C'était - et c'est toujours j'espère - le meilleur des colocataires.
Addendum bis : Pour ceux qui ont noté le terrible lapsus (corrigé depuis) "D'habite la nuit je prends un taxi"...eh bien je préfère ne pas commenter !
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