Aujourd’hui, j’ai rendez-vous avec Dana à l’université. Dana est
roumaine, elle vient de passer sa thèse à la Sorbonne et attend un poste à l’université
de Iasi. En ce moment, elle concocte les emplois du temps de la section Lettres
et elle donne quelques cours (payés à l’heure et au lance-pierre). Elle me
conduit dans un improbable café au cœur de l’université : il faut rentrer
dans la librairie de la fac, la traverser, et on atterrit alors dans une
magnifique salle en bois sombre. Un paradis pour les buveurs de thé et les
non-fumeurs (oui, j’avais oublié ça, l’impression d’avoir consommé un paquet de
clopes tout entier après quelques heures dans un bar. L’impression d’être
soi-même devenue une cigarette). Un endroit calme et reposant, chose précieuse
à Iasi. Je sens que ce café est le lieu idéal pour écrire un roman une
thèse. D’ailleurs, c’est décidé, j’y retourne demain pour travailler.
*
A 19h, je retrouve E. pour un concert de musique classique. E.
est française et travaille à l’ambassade. Nous entrons dans une salle déjà
pleine, le concert a commencé (c’est ma faute, je me suis encore perdue. Mais
quand trois lieux différents portent le même nom et que la rue n’est indiquée
nulle part, je vous assure que c’est une gageure d’être ponctuel). Violoncelle,
piano - magnifique. Je ne me sens pas dépaysée. Bach parle donc toutes les
langues.
*
A la fin du concert, nous faisons, E. et moi, un bout de chemin
ensemble. Elle me demande : « Alors, ça n’a pas été un choc pour vous
d’arriver à Iasi ? Je n’ai jamais vu une ville aussi laide, aussi sale ».
Ca fait un an et demi qu’elle vit ici et manifestement elle ne s’y habitue pas.
Subitement, je me sens contaminée par son amertume. Je suis terriblement poreuse
aux impressions des autres. C’est vrai que Iasi n’est pas ce qu’on peut appeler
une ville « jolie » (je l’avais pourtant entendu dire). Curieuse,
dynamique, intéressante, peut-être. Jolie, non. Mais il est hors de question
que je me laisse gagner par le dégoût. Je reprends l’expression d’une amie, que
je trouve très juste : ici, il faut apprivoiser l’apparente ingratitude
des lieux.
Les villes roumaines sont rarement très belles. A part quelques perles de Transylvanie. Mais promène-toi dans la campagne au printemps. A ce moment-là, n'oublie pas ton appareil photo. Il te servira plus que ton duvet quand tu auras les yeux plein de couleurs :-)
RépondreSupprimerEn plus tu as la chance d'être à quelques kilomètres seulement de la Bucovine.
Ne te laisse pas impressionner par la grisaille citadine de l'hiver. Il y a de la beauté même dans les immeubles délabrés et les alignements de blocs (mais là je parle surtout de Bucarest, je ne connais pas Iasi).
Garde ton œil curieux et ta joie de vivre. La beauté se trouve partout. En plus tu as la chance de sortir beaucoup et de profiter de la vie dynamique de cette ville qui n'a l'air de n'avoir de gris que l'aspect !
Pour parler complètement d'autre chose, je suis en train de lire un livre intitulé "Pas question de Dracula". Un recueil de nouvelles de trois auteurs roumains originaires de Iasi et ses environs (justement !). Un vrai régal :-)
Merci Ciboolette pour ce message revigorant ! Je vais faire en sorte de trouver vite-vite ce recueil de nouvelles, tu as aiguisé ma curiosité.
SupprimerJe ne suis jamais allee en Roumanie, mais je connais un pays "curieux, dynamique, interessant" mais qui est aussi "laide" dans d'autre cote de la Terre. Et je pense que, dans des pays comme ca, il ne faut pas chercher la beaute dans des batiments mais plutot dans du vent ou des rides des gens ou bien des ruelles obscures qui sont les temoins d'un pays qui a survecu a la tragedie historique.
RépondreSupprimerOui. J'ai pensé à ce message en prenant le tram ce matin. Les visages sont vraiment beaux ici. J'espère que j'aurai l'occasion de venir un jour dans ce pays de l'autre côté de la terre pour sentir le vent / toucher les rides / m'engager dans des ruelles obscures.
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